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PSIG et PSIG Sabre
Article mis en ligne le 15 avril 2018
dernière modification le 30 juillet 2022

par Nghia NGUYEN

  • La colonne d’assaut est un dispositif tactique qui permet de faire progresser un groupe d’hommes dans des conditions de protection maximale et de soutien mutuel. L’homme de tête - le plus exposé - porte, en plus de son équipement balistique (capable d’arrêter les balles), un bouclier balistique. Derrière lui le groupe chemine en file serrée. Plusieurs hommes n’en présentent ainsi qu’un seul de face (la direction dangereuse). Derrière l’homme de tête, les membres de la colonne se répartissent les secteurs d’observation et de tir latéralement (gauche/droite). Selon la configuration des lieux, le dernier membre couvre l’arrière de la colonne en observant dans le sens inverse de la progression. La colonne d’assaut est une configuration d’auto-protection mutuelle dans un environnement urbain ou confiné.

La version du HK G 36K de la Police et de la Gendarmerie comporte des chargeurs transparents permettant de connaître instantanément le nombre de coups restants

 

Le plan BAC-PSIG 2016

Les tueries islamistes de l’année 2015 ont eu pour conséquences immédiates de renforcer le maillage du territoire par les unités d’intervention de la sûreté intérieure. Aux unités déjà existantes mais désormais en nombre insuffisant, le plan BAC-PSIG du 1er janvier 2016 consacre un nouvel effort qui se voudrait à la hauteur de la menace que les terroristes d’Al Qaïda et de l’État Islamique font désormais planer. Il est ainsi décidé :

  • Un recrutement supplémentaire de policiers et de gendarmes.
  • Une formation spécifique aux tueries de masse.
  • Une amélioration sensible de l’équipement de protection, de combat et de communication (1).
  • Une doctrine d’action insistant dorénavant sur une posture offensive face à la menace.

PSIG et PI2G

La problématique des unités d’intervention de la Sûreté intérieure est de pouvoir agir le plus rapidement possible, en n’importe quel point du territoire avec des hommes entraînés et équipés de manière adaptée. Ce n’est pas une chose nouvelle pour la Gendarmerie nationale qui a mis sur pied le Groupe d’Intervention de la Gendarmerie Nationale (GIGN) au lendemain des attentats de Münich (septembre 1972). Trois ans plus tard étaient créés les premiers Pelotons de Surveillance et d’Intervention de la Gendarmerie (PSIG), dont le nombre allait croître très rapidement (370 unités actuellement).

Issus de la Gendarmerie départementale, considérés comme l’équivalent des Brigades Anti-Criminalités (BAC) de la Police nationale, les PSIG ont pour mission la surveillance générale de l’espace public de jour mais surtout de nuit. Collectant le renseignement, recherchant le flagrant délit, ils ont pour vocation d’intervenir sur tous les points sensibles - civils comme militaires - et ont des pouvoirs de police judiciaire. Essentiellement prépositionnés dans les zones sensibles, certains PSIG se sont spécialisés selon la géographie des risques et des menaces (sûreté nucléaire et transport aérien).

En novembre 2012, quelques mois après les attaques du terroriste Mohamed MERAH, étaient organisées des unités d’intervention plus lourdes - d’une trentaine d’hommes - à partir d’effectifs de la Gendarmerie mobile cette fois : les Pelotons d’Intervention Interrégional de la Gendarmerie (PI2G). Comme la terminologie de l’unité l’indique, les PI2G ont pour vocation d’intervenir à l’échelle des régions. Ils agissent, en fait, comme des antennes du GIGN d’abord prépositionnés à Orange, Toulouse puis Dijon. Début 2016, 4 nouveaux PI2G sont organisés à Nantes, Reims, Tours et Mayotte.

Gendarmerie nationale/Police nationale : une distinction opérationnelle de moins en moins pertinente

D’aucuns remarqueront la similitude des structures d’intervention Gendarmerie/Police : d’abord entre les PSIG et les BAC (autrefois appelées l’ « Antigang »), puis entre les PI2G et les GIPN (Groupes d’Intervention de la Police Nationale) (2) à l’échelle supérieure. Si les différences culturelles entre les deux institutions demeurent ainsi que les méthodes et les savoir-faire, la distinction entre une Gendarmerie dévolue aux espaces ruraux et interurbains et une Police opérant dans les villes n’est plus aussi claire qu’elle l’était autrefois. La mutation des menaces, leur fluidité, leur hybridation, jusqu’à la transformation même des villes devenues des zones ou des aires urbaines, expliquent une convergence sensible des missions traditionnelles entre les deux institutions.

Le rattachement organique, en 2009, de la Gendarmerie au Ministère de l’Intérieur (MININT) illustre cette évolution majeure. Tout en restant statutairement des militaires, les gendarmes opèrent désormais sous l’autorité du MININT, et si les zones police/gendarmerie demeurent c’est uniquement au sens administratif. L’extension des espaces urbains, la concentration des populations et des menaces que l’on y trouve - au premier rang desquelles figure le terrorisme islamiste -, amènent désormais policiers et gendarmes à agir sur les mêmes territoires.

 

PSIG Sabre à l’exercice dans un supermarché

Radio portable Tetra TPH 900 d’Airbus Defense & Space

 

Le PSIG Sabre ou gagner du temps

Institué par le nouveau plan BAC-PSIG, le concept d’unités « Sabre » est une réponse adaptée à cette évolution dans un contexte de forte menace islamiste. En retour d’expérience (RETEX) des tueries parisiennes de 2015, et au même titre que certaines BAC, certains PSIG subissent d’emblée un « durcissement » : formation spécifique aux tueries de masse, intensification de l’entraînement physique et tactique, renforcement matériel (équipement individuels, véhicules…). Organisés en unités de 15 à 30 hommes – tous volontaires -, équipé d’un véhicule monospace Volkswagen Sharan permettant d’emporter leurs matériels, les PSIG Sabre continuent d’assurer les missions initiales des PSIG tout en se préparant à affronter la menace terroriste.

Ce qui change surtout, c’est la doctrine d’emploi que l’on pourrait résumer en un point essentiel : gagner du temps. Comment y parvenir cependant ? D’abord en étant capable de se rendre sur le lieu d’une crise le plus rapidement. Dans un délai désormais fixé entre 20 et 30 minutes après l’alerte, un PSIG Sabre doit pouvoir être présent sur le lieu d’une Prise d’Otages de Masse (POM) en n’importe quel point du territoire.

L’unité Sabre doit être ensuite capable d’engager immédiatement les terroristes, mettant en pratique ce que de nombreux RETEX dans le monde ont montré jusqu’à présent : lorsque les terroristes aperçoivent les primo-intervenants - ou sont engagés -, ils cessent la tuerie pour se retourner contre les forces de sûreté. C’est donc dans une posture résolument offensive que sont préparés les PSIG Sabre. Leur mission est de fixer le ou les tireurs afin de :

  • Concentrer leur attention
  • Faire cesser une tuerie de masse
  • Donner le temps à une unité spécialisée (GIGN/RAID) d’intervenir

Alors que le dispositif Sabre monte en puissance pour atteindre 150 unités opérationnelles en 2018, la multiplication des exercices montre bien dans quel état d’esprit ces forces se préparent. Les PSIG Sabre affrontent des scenarii grandeur nature, où les unités doivent aborder et pénétrer des sites qu’elles ne connaissent pas forcément. Que ce soit dans un supermarché, des locaux industriels, une entreprise, un établissement scolaire, les PSIG Sabre doivent pouvoir se diviser en plusieurs sous-groupes et évoluer en autonomie selon la situation. Chaque unité est accompagnée d’un Moniteur d’Intervention Professionnel (MIP) ayant suivi 100 heures de formation spécialisée au Centre National d’Entraînement des Forces de Gendarmerie (CNEFG) de Saint-Astier. Chaque homme reçoit une formation approfondie en sport de combat, en tir et en tactique (3).

Pour faire cesser une tuerie en concentrant l’attention des terroristes, les gendarmes des PSIG Sabre savent qu’ils devront eux-mêmes attirer les tirs adverses, et qu’il faudra le faire le temps nécessaire à l’arrivée de renforts. Les 4 premiers militaires qui entreront dans l’espace tenu par les terroristes (la tête de la colonne d’assaut) seront les plus exposés indépendamment de leurs matériels de protection (casques à visière balistique, bouclier balistique, gilets pare-balles).

Sans atteindre l’excellence opérationnelle du GIGN, les PSIG Sabre n’en constituent pas moins des unités de proximité, indispensables à l’échelle locale. Leur niveau d’engagement - plus que jamais crucial pour atténuer les pertes lors d’une tuerie de masse - devrait permettre l’élimination d’une menace terroriste, sinon précéder l’intervention du GIGN dans la gestion de crise.

__________

  1. Cf. BAC et PSIG sont maintenant équipés de HK UMP-9, HK G36, de fusils à pompe en plus du pistolet automatique Sig Sauer SP2022. Des systèmes de vision nocturne et d’aide à la visée sont aussi en dotation.
  2. Cf. Les GIPN jouant le rôle d’antennes en province pour l’autre deuxième grande unité d’intervention : le RAID (Recherche, Assistance, Intervention, Dissuasion).
  3. Cf. Depuis mai 2018, la Gendarmerie renforce son interopérabilité avec l’Armée de Terre et militarise ses tactiques. Installé dans la durée eu égard à la montée des menaces, ce partenariat est à observer en parallèle avec la création et la montée en puissance d’une réserve opérationnelle au sein de la Police nationale à partir de 2022.

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